Comme elle l’avait fait dans l’arrêt Siliadin c/ France du 26 juillet 2005, la CEDH, dans son arrêt de chambre C.N. et V
c/ France du 11 octobre 2012, estime (à l’unanimité) que l’État français n’a pas mis en place un cadre législatif et administratif permettant de lutter efficacement contre l’esclavage domestique, et constate, de ce chef, la violation de l’article 4 de la Convention européenne des droits de l’Homme (interdiction de la servitude et du travail forcé), même si certains griefs des requérantes ne sont pas retenus, la Cour estimant que l’obligation de l’État de mener une enquête effective sur les cas de servitude et de travail forcé n’a pas été violée.
En l’espèce, deux sœurs (10 et 16 ans) avaient quitté le Burundi où leurs parents avaient été tués, et étaient venues en France vivre chez leur oncle et leur tante diplomates, qui les contraignaient à de lourds travaux ménagers et domestiques non rémunérés sous la menace d’un renvoi au Burundi.
Il y avait certes eu une enquête de la brigade des mineurs en 1995, mais ce n’est qu’en 1999 que les deux sœurs avaient pu fuguer et s’en remettre à une association qui avait signalé la situation au parquet, à la suite de quoi l’immunité diplomatique de l’oncle et de la tante ayant été levée, une condamnation avait été prononcée, mais seul le volet civil de l’affaire était arrivé jusqu’en Cour de cassation.
La Cour retient que les dispositions pertinentes du Code pénal n’ont pas assuré une protection concrète et efficace, ce qui viole l’obligation positive de l’État de mettre en place un cadre légal et administratif de lutte contre ces situations §§ 106-107 de l’arrêt C.N. et V., reprenant les §§ 146-148 de l’arrêt Siliadin.
L’obligation de criminaliser et de réprimer n’est pas simplement textuelle et formelle, mais doit établir une protection concrète et effective.
http://hudoc.echr.coe.int/sites/fra/pages/search.aspx?i=001-113407